Réactions du SE-UNSA sur le rapport parlementaire sur les RASED
Le sort funeste réservé aux RASED se confirme
Alors que les enseignants des RASED sont présentés par les auteurs du rapport comme “dévoués et remarquables “(p. 5), et que selon eux, il ne faut surtout pas les supprimer « nous ne voulons pas, de manière unanime, je suppose, d’une asphyxie lente des réseaux » (p. 43), les scénarios qu’ils proposent mènent tous inexorablement à leur démantèlement. Hypocrisie ou manque de conviction ?
Une incompréhension profonde de l’action des RASED
On apprend par exemple que “ce type d’action (les aides spécialisées), à raison, en moyenne, de deux séances par semaine, d’une durée de quarante-cinq minutes chacune, ne permettrait pas d’obtenir des évolutions significatives, le mouvement de prise en charge étant trop long. Pour parvenir à des résultats, le volume d’intervention à respecter, pour des aides ciblées, devrait donc être au moins égal à trente minutes par jour” (p. 28).
Cela traduit une incompréhension profonde du fonctionnement des RASED qui peuvent offrir aux élèves rencontrant des difficultés des réponses souples, adaptées et vraiment personnalisées. On sent la volonté de déterminer et d’instaurer des protocoles figés qui seraient “efficaces pour tous”.
De plus “l’extraction” (p. 28) des élèves de la classe semble être un vrai point d’achoppement ; pas de mention du fait que l’aide en classe existe déjà, pas de conscience que la sortie de la classe peut être indispensable dans certains cas et que le contenu “manqué” peut être négligeable au regard des bénéfices retirés de l’aide spécialisée. On retrouve bien ici l’idée que l’élève ingurgite des connaissances à l’école en omettant tout ce qui lui permet ou non d’apprendre.
Une évaluation datée
Il est fait référence tout au long du rapport à une évaluation du dispositif RASED menée il y a 15 ans (!) : quelle fiabilité accorder à une évaluation aussi ancienne alors que les modalités d’actions des RASED ont évolué depuis. Quant au regret réitéré qu’il n’y ait aucune étude plus récente, il faut renvoyer la responsabilité de ce manque aux responsables que sont les autorités ministérielles.
Des pistes désordonnées
Ce rapport propose pêle-mêle des pistes de réflexion : faire de l’aide spécialisée sur les temps d’aide personnalisée, favoriser des actions massées (par exemple 6 à 8 h de prise en charge par semaine p. 29), remédier dans la classe, avoir un rôle de conseil auprès des collègues, sédentariser les enseignants spécialisés pour éviter le côté “ponctuel” des interventions... Certaines ne seraient pas dépourvues d’intérêt dans le cadre d’une pérennisation des RASED avec un vrai souci de répondre aux besoins des élèves. C’est hélas loin d’être le cas !
Le SE-UNSA n’a pas manqué pourtant de pointer les dangers de la sédentarisation (p. 26), les difficultés spécifiques aux zones rurales (p. 29), l’importance de la prévention en maternelle (p. 37) mais aussi d’autres éléments qui ne figurent pas dans le rapport comme l’importance du travail effectué auprès des familles, l’aide à l’orientation des élèves (enSEGPA)...
Des scénarios imprécis mais à l’issue fatale
Il est impossible de rendre compte de façon synthétique du contenu du rapport tant il part dans tous les sens, mais voyons de plus près les scénarios qu’il propose.
Le premier part du principe que le “nœud du problème” (p. 32 mais quel est le problème !) est la distinction entre maître E et maître G. Il préconise donc une suppression de la distinction entre aide rééducative et aide pédagogique, considérant que “les maîtres G,
dispensant les aides à dominante rééducative, « se démarquent de leur mission de
restauration des apprentissages scolaires en faisant un travail de psychothérapeute, qui devrait être effectué en centre médico-psychopédagogique»” (p. 32). Il est également “reproché” aux maîtres G de favoriser les prises en charge individuelles et qui plus est “hors classe”. Donc il ne resterait que des aides à dominante pédagogique avec la probabilité forte d’un recentrage sur les élèves en situation de handicap. On sortirait donc du cadre de la “difficulté scolaire ordinaire”.
Par ailleurs “M. Luc Chatel, lui, a estimé que « la distinction [entre maîtres E et G] n’a pas vocation à disparaître tant que nous ne disposerons pas d’une évaluation plus fine »” (p. 34). Difficile de s’y retrouver.
Ce premier scénario préconise aussi une poursuite de la sédentarisation des enseignants spécialisés.
Le second scénario consisterait à “sédentariser les maîtres E dans les écoles à plus forts besoins et à organiser des réseaux ou des équipes de maîtres G par département ou bassin scolaire. Ce schéma permettrait aux enseignants dispensant l’aide à dominanterééducative de continuer à intervenir sur un secteur comprenant plusieurs écoles et de soulager ainsi les équipes enseignantes se trouvant démunies face aux troubles du comportement de certains élèves” (p. 36). Ce qui revient à supprimer la souplesse des réseaux, donc la notion même de RASED, à exclure les élèves en zone rurale et les élèves en difficulté des établissements non-prioritaires. De plus on notera que les “équipes volantes” de maîtres G auraient pour objectif de “soulager les enseignants”. Et les élèves ?
En conclusion
Ce rapport très confus n’arrive à aucune proposition claire, ce qui n’est pas étonnant puisqu’au fond la suppression de 5700 postes dans le primaire sans toucher au nombre de classes ne peut que conduire à la condamnation des RASED.
On appréciera néanmoins que les auteurs du rapport n’aient pas pu nier leur utilité et les compétences des enseignants spécialisés. Les deux rapporteurs, issus de l’UMP, n’ont pas voulu se désolidariser de la politique désastreuse du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite.
Le SE-UNSA continue de se mobiliser pour défendre les RASED
Alors que toutes les préconisations actuelles confortent la nécessité de lutter contre l’échec scolaire, le SE-UNSA condamne la suppression de 5700 postes prévue dans le premier degré qui cible à nouveau les RASED.
Cette approche ne tient pas compte des besoins des élèves et des écoles, ni de l'avis des parents. Elle conduit tout droit à la désorganisation définitive des RASED, à leur disparition à très court terme et au renforcement des inégalités dans l’école publique.
Le SE-UNSA continue de se mobiliser au sein du collectif RASED* pour relancer le débat public sur les aides spécialisées, en adressant une lettre ouverte à l'ensemble des élus de la nation dans cette période de vote du budget, sur la nécessité de préserver les RASED et les moyens de l'école, pour accompagner tous les élèves vers la réussite scolaire. Il participera à des réunions débat organisées dans les départements avec les différents partenaires, à partir de la diffusion du film de la FNAREN « Un parmi les autres ». Il demande aussi une audience au ministre de l'Éducation Nationale pour connaître ses intentions concernant le devenir des RASED.
*Le collectif RASED rassemble les associations professionnelles (AFPEN, FNAME, FNAREN, ANCP), les organisations syndicales (FO, SE-UNSA, SGEN-CFDT, SIEN-UNSA, SNPI-FSU, SNUIPP-FSU, Snpsyen, SUD-Educ, UNSEN-CGT), les associations de parents (FCPE, PEEP), ainsi que les mouvements pédagogiques (AGSAS, GFEN, ICEM-pédagogie Freinet)